Suckerpunched

La blague est facile, mais c’est sincèrement l’impression que j’ai eu en allant voir le film Suckerpunch ce WE: entre d’autres termes, l’impression de m’être fait avoir

Voilà. Bon, à partir de là, y a un risque de spoilers à tout moment. Zêtes prévenu. Me faudrait un panneau spoiler… Ca fait pas d’électricité, mais ça pourrait aider la société aussi. Bref. Suckerpunch a été réalisé par Zack Snyder, dont vous avez peut être entendu parler par des petits films comme 300 ou Watchmen. Comme d’hab, ça déborde de testostérone de partout, et quand on sait que les héroïnes sont cinq filles, je vous laisse imaginer la chose. Et comme j’ai beaucoup aimé les deux films cités plus haut, je me suis laissé entrainer par les promesses de celui là. Le sous titre, après tout, est “La réalité est une prison, votre esprit est la clé”

Dans notre société actuel, c’est tentant, non?

Synopsis détaillé, titre trompeur

Bon, faut avouer, le père Snyder sait mettre en place des ambiances. Et par là, je veux dire de bonnes ambiances, pas des longueurs. On commence dans un dégradé de noir et blanc, sans la moindre parole, juste des bruits, avec le postulat de base qu’on a tous un ange gardien qui nous pousse à nous battre, mais qu’il peut prendre toutes les formes. On comprend que le beau-père de l’héroïne est tout content de voir sa femme mourir, parce qu’il va pouvoir toucher l’héritage et “s’occuper” correctement de ses belles filles. Un homme honorable, quoi. Sauf que la mère, qui n’avait apparemment pas toute sa tête (c’est de famille, comme on va le voir), a tout transmis à ses filles. Donc, lui, pas content, se jette sur l’héroïne, elle le griffe, il l’enferme et va voir sa soeur. Elle sort par la fenêtre, prend le flingue du monsieur vu plus tôt, tire, le rate et profite qu’il a peur pour secourir sa soeur. Qui est apparemment morte, vu que l’héroïne, lorsqu’elle lui soulève la tête, se retrouve avec du sang pleins les mains (comme je vous ai dit, c’est de famille…). Elle fuit la maison, et bien sur, le gentil beau père incompris appelle les flics et lui met tout sur le dos.

Elle finit donc à l’asile, et comme elle a été très méchante et que le bon père a donné 2000 dollars pour qu’on “s’occupe d’elle au mieux”, elle va être lobotomisé dans 5 jours.

Whoah. On prend tout ça en pleine tronche en moins de 10 minutes, j’ai vu plus joyeux comme démarrage mais ok, ça me va très bien.

Là, dans ma petit tête, je me suis dit “bon, le méchant, c’est le beau père, la docteur dit qu’il faut s’imprégner de ce qu’on a vécu, il a une superbe triple griffure sur l’oeil qui fait une marque distinctive, on va le revoir lors des scènes dans sa tête”

(la preuve que c’est distinctif)

Comme quoi, je peux me planter quelque chose de mignon, des fois. Bon, elle avance dans les couloirs, la caméra nous montre une carte, un couteau, un panneau “en cas de feu, toutes les portes s’ouvrent”, et une clé autour du cou de l’infirmier en chef qui a accepté de la lobotomiser. Malin comme je suis, je sens que ça va avoir de l’importance, tout ça.

Et là, juste avant sa lobotomie, les couleurs apparaissent et on se retrouve dans un bordel, la lobotomie n’étant qu’une scène jouée. Par une autre femme. Pendant tout le film, la “réalité” va être ce bordel où les filles dansent et plus pour les clients, où la doctoresse est la prof de danse, et l’infirmier est un mec à l’italienne avec la petite moustache qui rend bien. Et la lobotomie est représentée par le fait qu’elle va être vendue au High Roller, un type apparemment pas très sympa.

J’ai pas compris le symbole, là. Surtout qu’en fait, chaque fois que Babydoll (l’héroïne) agit (récupère un des éléments avec les autres filles), elle danse, et sa danse est représentée par une des scènes fantastiques qu’on peut voir sur les posters de pub. Et chaque fois qu’elles vont se déplacer d’un endroit à l’autre, ce sera les murs décrépits de l’institut, mais les filles seront habillées comme dans le bordel. Bref, on sait plus quoi est quoi.

La première scène de danse, Babydoll se retrouve devant un temple bouddhiste. Dedans, un vieil homme (apparemment son ange gardien, qui va réapparaitre dans chaque scène d’action) lui donne un sabre et un pistolet, et lui dit qu’il lui faut récupérer une carte, du feu, une clé et un couteau si elle veut s’échapper. On nous les remontre dans la réalité de l’asile histoire d’être sur qu’on a compris de quoi il parle. (Note: moi, j’aurais un katana, je m’en foutrais, du couteau.) Juste après, séquence action: trois combats enchainés contre des statues démoniaque. La première avec un naginata (superbe), la troisième avec un katana, la deuxième… Avec un lance roquettes et une gatling.

Le ton du film est posé. C’est n’importe quoi, ça explose dans tous les sens, c’est assez joli à regarder.

Et ça s’arrête jamais.

Intensité

Au tiers du film, me suis retrouvé hors d’haleine, parce que l’intensité dans Suckerpunch, c’est ça:

Il est plutôt conseillé de faire ça:

C’est à dire, accrocher l’intérêt du spectateur avec une scène intense (qu’on s’entende, intense, c’est pas forcément une scène d’action où ça pête, hein), puis le laisser respirer en baissant l’intensité et remonter de temps à autres l’intensité pour le garder avec nous. Et finir sur le climax, avec une intensité jamais atteinte avant, pif paf pouf. ET VOUS LAISSEZ RETOMBER L’INTENSITE !

Vous finissez avec un moment plus calme, un dénouement qui lui permette de revenir s’ancrer dans la réalité.

Suckerpunch est à fond pendant tout le film.

Rythme

Je voudrais remercier Skoras de m’avoir permis de mettre des mots sur autre chose d’important quand on raconte une histoire: le rythme. Et surtout, ses cassures (comme ça, on va voir si j’ai bien compris le concept). Pour qu’une histoire nous accroche, très souvent, il faut du suspense. Un bon moyen d’y arriver, de nous faire accompagner les héros, c’est d’avoir une succession de moments positifs et négatifs. Par exemple (j’ai revu 58 minutes pour vivre y a quelques jours), les gentils s’aperçoivent qu’ils peuvent utiliser une antenne à l’écart pour communiquer avec les avions (positif !). Mais lorsqu’ils y vont, on s’aperçoit que les méchants l’avait prévu et descendent tous les policiers envoyés (négatif). Heureusement, John MacClane tue les méchants (positif). Mais les méchants avaient piégé l’antenne et elle explose (négatif).

Dans Suckerpunch, j’ai vraiment besoin de vous le dire? Bon, ok… Vous me le lisez sur le passage trompette de Penny Lane (ou vous écoutez le Pérusse correspondant): -Positif! Positif, positifpositifpositif! Po po po positif! (75% du film atteints) Et après, négatif, négatif, négatif néééééééggggggggaaaaaaaatttttttiiiiiiiiifffffffuuuuuuuuuuu. Et tout petit positif.

[Spoiler]Elles arrivent à tout faire, puis aux 3/4 du film ça commence à foirer, et y en a les 3/5 qui meurent. L’héroïne se fait lobotomiser et y en a qu’une qui s’en sort[/spoiler]

Et si on faisait comme Inception?

Sauf qu’en fait, rien n’est moins sûr pour le petit positif final. Parce que la fille en question entre dans un bus conduit par l’ange gardien (qui la sauve de policiers qui la cherche), que la personne qui monte devant elle est un gamin qu’on a entrevu lors d’une scène d’action précédente et avec qui elle a échangé un long regard à ce moment là et que le bus va vers Paradise Diner.

Tiens, et puis maintenant que j’y pense, c’est elle qui jouait le rôle de la fille qui allait se faire lobotomiser en portant le costume et la perruque de Babydoll au début. Bref, y a de bonnes chances qu’elle soit morte aussi, mais on en sait rien. C’est pas clair, c’est voulu, mais ça a un coté gratuit. Notez qu’on ne sait même pas comment les autres filles sont mortes, puisqu’elles se sont faites descendre dans le bordel, mais sachant que ça a l’air de géner personne dans la réalité. Pour ce qu’on en sait, elles ont été lobotomisées en masse.

Au moins, quand même, l’infirmier se fait pincer et va surement baver sur le beau-père. Justice est faite (hum) !

Les petites bonnes femmes en mousseeuh

Pour finir, on a les personnages… Lors des scènes d’action, les rôles sont clairement définis: Babydoll est leader, Amber est pilote, L’une des soeurs sert à rien pour que l’autre vienne la sauver, et Blondie sert de sniper, plus ou moins.

C’est à peu près tout le développement qu’elles ont, et en plus, ces rôles ne correspondent à rien dans la réalité: pendant que Babydoll danse, l’une des autres récupère l’élement. Dans les scènes, c’est Babydoll qui récupère tout, les autres sont en soutien.

Les personnages sont juste plats. On a une vague idée du passé des deux soeurs (version bordel), on a aucune idée de ce qu’elles aiment, détestent, rêvent. Le méchant est le classique mac qui tire le maximum de ses filles en étant tour à tour gentil et méchant. La docteur/prof de danse, ben… Leur apprend à danser …

Youpi

On efface tout et on recommence?

Ben… Non. Parce que l’idée est intéressante. Snyder a pour lui de ne pas avoir fait un film classique, et je pense qu’on ne peut qu’y réagir, en bien ou en mal. Je doute qu’il laisse indifférent.

C’est, à mon avis, le format qui est complètement inadapté. Là, on a 4 scènes d’action successives, sans lien avec la réalité, et sans lien entre elles ! On a une scène à la Tsui Hark, une scène de Première Guerre Mondiale version Steampunk (j’adore), une scène en fantastique médiéval (elles ont toujours leurs gros guns, et chassent le dragon) avec un côté le Règne du Feu, une scène futuriste pour désamorcer une bombe (j’ai pas de film équivalent, mais c’est des robots sans visage en face). Je crois que j’oublie rien. Et quand on tire, on raconte pas sa vie. Donc, ça cause pas des masses, et y a pas d’occasion de bonnes phrases qui tue comme dans ses deux films précédents.

A mon sens, ca collerait en jeu vidéo, mais surtout ça collerait sous la forme d’une série en 13 épisodes, idée que je développerai dans un article ultérieur.

Sur ce, à bientôt, et je serai curieux de savoir ce que VOUS avez pensé du film…

6 Responses to “Suckerpunched”

  1. Skoras says:

    Du coup tu me donnes envies de le voir ce film, par curiosité. 😛 Ta réflexion sur le format n’est pas inintéressante. Je me rappelle avoir pensé ça pour plusieurs films dernièrement… Notamment The Last Airbender : A l’origine, il s’agit d’une série d’animation à l’origine qui s’est vu adaptée en film. Là où le découpage en épisode pose bien les choses, le film qui lui reprend toute la 1ère saison d’un coup est beaucoup trop rapide et on a pas le temps de souffler. On en prenait plein les yeux, mais à côté de ça, on s’attache pas aux personnages, ni à l’intrigue, bref pas à grand chose. :s

  2. Rince says:

    Merci Modran. Merci.
    Du coup, j’imagine que tu n’es pas trop interesse par l’idee de me racheter l’artbook officiel ?
    PS: On se fait un cine quand vous voulez, je sais que Sko a du temps a tuer en ce momemt. :p
    PSS: Aucun de vous deux n’est sur senscritique.com par hasard ?

  3. Modran says:

    @Sko: Y a une logique derrière les formats… Et c’est sur que résumer une saison entière en un film, surtout si tu veux rien couper, ça laisse des traces sévères dans le macadam. Le film n’est pas mauvais, il y a des choses intéressantes, je ne te dirais donc pas de pas le voir.
    Je te dirais pas non plus d’y aller 🙂

    @Rincefeu: J’en conclue que le film est mal passé ? Il vaut quoi l’artbook :p? Parce que faut avouer que visuellement, le film est beau… Et nan, suis pas sur senscritique. Connaissait même pas jusqu’à y a deux minutes. Ze regarde ça.

  4. Rince says:

    L’artbook me fait penser a de la recherche graphique pour une pub : des collages toshop avec des filtres pourris. Tout n’est pas a jeter mais dans l’ensemble on dirait qu’il on pris tout ce qu’ils ont pu trouver, qu’ils ont tout foutu dedans et a Snyder de rajouter ses commentaires. Bref l’ensemble manque de profondeur a mon gout. L’artbook de 300 est bien mieux je trouve.

    Pour revenir a SP, le film a plein de qualite, a commencer par la DA… mais elle est tellement mal exploitee qu’elle se revele plate au possible. La faute au rythme et a des choix de realisation. Film baclee pour moi. A ce demander si Snyder a vraiment voulu faire son Inception.

    Si jamais j’achete le film en dveud, ca sera uniquement pour sa scene d’introduction : une lecon de mise en scene !

  5. Jolun says:

    L’idée d’aller le voir m’a traversé l’esprit (n’ayant vu ni 300 ni l’autre mentionné je me disait que je voulais pas louper celui-ci), mais je suis tombé très rapidement sur des critiques qui disaient peu ou prou la même chose que Modran (en moins développé bien sur les critiques de ciné ne s’abaissent pas à ça), et finalement je me suis abstenu. Dois-je conclure que j’ai bien fait ?

    Comme quoi avoir des trucs à faire tout le temps ça aide à éviter les indigestions de navets !!

  6. […] vous auriez cru que je passerai autant de temps sur ce film, vous? Parce que moi carrément […]

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